Vers des interventions locales face à la Covid-19 qui tiennent compte des enfants et des jeunes migrant·e·s à travers l’expérience #CitiesAreListening

14.12.2020

Les expériences #CitiesAreListening ont pour vocation de transcender la distance sociale et d’évoluer vers un monde mené par les communautés. Dans le cadre de la mise en œuvre du Pacte pour l’avenir que CGLU est en train de mettre au point, avec le concours des communautés, la session #CitiesAreListening portant sur la « Réponse des gouvernements locaux et régionaux face à la Covid-19 et rétablissement pour les enfants et les jeunes migrant·e·s et déplacé·e·s » a permis de faire connaître les perspectives, les besoins et les contributions d’une communauté qui devient partie intégrante de la réponse et des efforts de relance menés au niveau local face aux répercussions de la Covid-19 – la jeunesse en mouvement.

Le lundi 30 novembre, cette expérience a donné lieu à un dialogue entre les maires et les délégués de la jeunesse sur ce que les collectivités territoriales peuvent faire – et font – pour s’assurer que les enfants migrant·e·s et déplacé·e·s et leurs familles soient impliqués dans les phases de préparation, intervention et rétablissement suite à la pandémie de Covid-19. La session a été co-organisée par CGLU, Metropolis et ONU-Habitat en partenariat avec UNICEF et le projet Migrations ville-à-ville en Méditerranée (MC2CM).

L’expérience #CitiesAreListening, inaugurée par Emilia Saiz, secrétaire générale de CGLU, a débuté par un panel d’introduction sur les contributions des enfants et des jeunes migrant·e·s dans les réponses locales apportées face à la Covid-19 et leurs besoins urgents. Parmi les intervenant·e·s figuraient la maire de Polokwane et co-présidente de CGLU, Thembisile Nkadimeng, Shipra Narang Suri, cheffe des pratiques urbaines à ONU-Habitat, Ahmed Karimi, délégué de la jeunesse du Grand groupe des Nations unies pour l’enfance et la jeunesse (UNMGCY) et Laura Healy, spécialiste des politiques au sein d’UNICEF, laquelle a présenté le nouveau kit de ressources d’UNICEF sur la Covid-19 et les enfants migrant·e·s et déplacé·e·s.

 « L’égalité est au cœur de la reprise. Nous devons accorder une attention particulière à la manière dont la pandémie affecte les personnes en situation de déplacement – en particulier les enfants et les filles, en veillant à ce que leurs droits soient reconnus, surtout lorsqu’ils et elles appartiennent également à des populations qui ont été historiquement discriminées ». Thembisile Nkadimeng, maire de Polokwane et co-présidente de CGLU.

« La jeunesse en mouvement peut aussi jouer un rôle crucial dans la mesure où elle peut combler le fossé technologique pour toute la famille ». Ahmed Karimi, délégué de la jeunesse, UNGMCY.

Ces remarques introductives ont été suivies par une table ronde de maires mettant en avant les pratiques en vigueur au niveau des villes en matière d’intervention et de rétablissement qui tiennent compte des besoins des enfants et des jeunes migrant·e·s et déplacé·e·s dans le cadre de la Covid-19. Parmi celles-ci, les participant·e·s ont souligné l’importance de mettre un terme au travail des enfants. À cet égard, Téhéran et Quito ont exposé les mesures prises dans leurs villes pour inverser la tendance et établir des règlements pour protéger les enfants.

Gissela Chalá, maire adjointe de Quito, a expliqué la manière dont le cadre national en place permet de défendre les droits des jeunes à Quito et a souligné la pertinence des dispositifs juridiques visant à adopter une approche intégrée et efficace pour éradiquer progressivement le travail des enfants.

Dr Javadi Yeganeh, adjoint au maire pour les affaires sociales et culturelles de la municipalité de Téhéran, a souligné les progrès réalisés par Téhéran, en tant que ville pilote de l’Initiative des « Villes amies des enfants » d’UNICEF, pour proposer des services éducatifs aux enfants immigrés. Il a également souligné le rôle crucial joué par ces derniers et leurs familles pour soutenir les efforts de la municipalité en réponse à la Covid-19.

Fongu Cletus Tanwe, maire de Bamenda, a fait part de la grande diversité des efforts déployés par la commune pour réinscrire les enfants immigrés à l’école en subventionnant les frais de scolarité et les coûts du matériel pédagogique.

La troisième partie de la session a permis aux élu·e·s locaux et aux délégués de la jeunesse du Grand groupe des Nations unies pour l’enfance et la jeunesse (UNMGCY) d’engager une réflexion prospective sur la manière dont les villes peuvent intervenir en faveur des enfants en situation de déplacement dans le cadre de la Covid-19.

Macoura Dao, maire de Foumbolo et présidente du REFELA, a rappelé que les enfants souffrent particulièrement des effets de la Covid-19 et a appelé à se mobiliser autour de la campagne du REFELA pour protéger les enfants de la rue dans les villes africaines.

Ricardo Rio, maire de Braga, a souligné la nécessité de renforcer les liens entre les municipalités et les associations de jeunes, d’affirmer la responsabilité sociale des jeunes comme une étape clé vers des réponses d’urgence à court terme, de s’attaquer aux barrières linguistiques et de favoriser l’inclusion et la cohésion sociale des migrant·e·s dans la ville.

Cet argument a également été mis en avant par Johnny Pereira, délégué de la jeunesse de l’UNMGCY, qui a mis en avant combien il était important de coordonner les activités entre les organisations de la société civile locales et les organisations communautaires et internationales telles que le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (HCR) et UNICEF en vue de l’intégration des migrant·e·s, en particulier dans les sociétés d’accueil fragmentées.

Rachida Saadi, responsable de la coopération et des relations extérieures à Oujda, a souligné la façon dont la coopération internationale et les projets de partenariat ville à ville, tels que le projet MC2CM, ont contribué à la création d’une base de données complète sur les migrant·e·s à Oujda, qui doit permettre à la municipalité d’identifier efficacement les acteurs clés en matière de gouvernance des migrations, notamment les enfants et les jeunes migrant·e·s, grâce à une approche multipartite.

Trang Vu, déléguée de la jeunesse de l’UNMGCY, a mis en lumière l’importance de la contribution des jeunes migrant·e·s par le biais de réseaux informels et d’ONG locales en tant que catalyseurs pour combler le fossé en matière d’information et de services de santé pour les populations migrantes pendant la pandémie.

L’établissement de relations de confiance entre les populations migrantes et les collectivités territoriales ainsi que le maintien de l’accès des migrant·e·s aux services publics locaux essentiels, notamment les services de protection de l’enfance, sont apparus comme des priorités clés au cours de la session. Les maires ont reconnu le besoin urgent de changer de discours pour s’assurer que les personnes migrantes sont considérées comme des ressources humaines nécessaires pour le développement local. Les délégué·e·s de la jeunesse ont rappelé que la jeunesse en mouvement a joué un rôle crucial dans la réduction de la fracture numérique et du manque d’information pour l’ensemble de leurs familles et des populations migrantes, compte tenu des restrictions imposées par la Covid-19. Les jeunes migrant·e·s sont devenus des phares en matière d’information et de médiation culturelle pour leurs communautés.

Emilia Saiz a conclu cette réflexion collective en saluant les progrès réalisés dans cette discussion comme un premier pas vers l’élaboration d’un nouveau contrat social basé sur les principes de l’Agenda 2030 et d’un nouveau Pacte pour l’avenir. La prise en compte des besoins des jeunes et des enfants migrant·e·s dans les politiques de migration et le renouvellement de la confiance de toutes les populations envers les gouvernements locaux et régionaux ont été mentionnés comme des étapes essentielles pour garantir la santé, la sécurité et la protection de toutes et tous, et en particulier des plus vulnérables.

« Les sociétés et les pouvoirs locaux en tant qu’échelon de gouvernement le plus proche de la société ont un rôle clé à jouer dans la protection des enfants, y compris les enfants migrant·e·s. La fourniture de services de base est très importante à cet égard et cette session a permis d’identifier des interventions concrètes ciblées sur la fourniture de services de protection de l’enfance qui peuvent réellement faire la différence. Cette pandémie nous a permis de réfléchir différemment sur ce qui est essentiel et ce qui ne l’est pas. Et nous sommes convaincu·e·s qu’il sera crucial à l’avenir de répondre aux besoins des enfants migrant·e·s ». Emilia Saiz, secrétaire générale de CGLU.

Recommandations politiques clés :

Améliorer l’accès aux services de base

  1. Associer les enfants migrant·e·s et déplacé·e·s aux efforts de préparation, d’intervention et d’atténuation face à la Covid-19, notamment en améliorant l’accès aux services de base.
  2. Renforcer l’offre en matière de services publics, notamment les soins de santé, l’eau, l’hygiène et l’assainissement, la protection sociale et la protection de l’enfance, afin de faciliter l’accès des familles migrantes et déplacées aux services de base.
  3. Établir des pares-feux entre les prestataires de services locaux et les autorités compétentes en matière d’immigration, afin que les familles sans papiers ne soient pas découragées d’utiliser les services par crainte d’être détectées. Supprimer les exigences d’identification qui limitent l’accès aux services.
  4. Reconnaître les services de protection de l’enfance comme des services de base essentiels, et s’efforcer d’éradiquer le travail des enfants et d’améliorer les conditions des travailleurs et travailleuses mineur·e·s.

Renforcer le climat de confiance et la participation

5.    Donner la priorité à l’instauration d’un climat de confiance entre les institutions publiques et les jeunes migrant·e·s et personnes déplacées et leurs familles afin de favoriser leur inclusion au niveau local.

  1. Veiller à ce que les décisions et les politiques publiques tiennent compte des points de vue des enfants et des jeunes en situation de déplacement en favorisant des mécanismes de participation plus audacieux et plus inclusifs.
  2. Mettre en place des conseils de la jeunesse composés de jeunes issus de différentes communautés et organisations afin de permettre une consultation, une coopération et des conseils continus et approfondis en matière de gouvernance urbaine.

Encourager une communication et un récit justes

  1. Améliorer la communication entre les enfants et les jeunes migrant·e·s et déplacé·e·s et leurs communautés d’accueil afin de favoriser l’inclusion, de lutter contre la désinformation et de créer des passerelles entre les populations.
  2. Mettre en œuvre des stratégies d’éducation pour l’apprentissage continu de tous les enfants – y compris celles et ceux qui sont migrant·e·s ou déplacé·e·s – et faire en sorte que les écoles soient des environnements sûrs, sains et inclusifs pour les enfants et les familles en situation de déplacement.

Combler le fossé culturel et numérique

  1. Tirer parti et promouvoir le rôle des enfants et des jeunes en tant que partenaires clés pour lutter contre la désinformation et soutenir l’inclusion des personnes migrantes et déplacées dans les politiques urbaines – nombre de ces jeunes migrant·e·s et déplacé·e·s jouent déjà le rôle d’interprètes culturels pour leur famille et leur communauté.
  2. Reconnaître les enfants et les jeunes migrant·e·s comme des partenaires clés pour aider à combler la fracture numérique, accélérer le progrès, l’innovation et réduire les inégalités au sein de leurs communautés.

Prochaines étapes :

CGLU reste engagée à faire avancer ce programme au niveau mondial, en comptant sur le soutien d’UNICEF, pour mieux outiller les villes et les régions du monde avec les instruments, les ressources et les arguments dont elles ont besoin pour inclure, protéger et renforcer l’autonomie de chaque enfant et jeune migrant et déplacé. Dans le même temps, UNICEF offre des opportunités uniques de mettre en valeur le rôle et le travail essentiels des collectivités territoriales qui défendent les droits des enfants et des jeunes migrants et déplacés – en les écoutant, en travaillant avec eux et en les aidant à exploiter leur potentiel. Sur la base de ces discussions, CGLU et UNICEF envisagent la mise au point d’une boîte à outils commune et la tenue de plusieurs sessions de renforcement des capacités pour aider les collectivités territoriales à prendre en compte les enfants et les jeunes migrants et déplacés dans leurs activités d’intervention et de reprise suite à la Covid-19.