Renforcer la contribution des personnes migrantes à l’urgence et aborder les vulnérabilités pendant la crise du COVID-19 #BeyondTheOutbreak
20.04.2020
En tant que niveau de gouvernement le plus proche des citoyens, les collectivités locales et régionales portent la plus grande responsabilité pour “ne laisser personne derrière”, quel que soit le statut juridique des personnes.
La série d’apprentissage en direct organisée par CGLU, Metropolis et ONU-Habitat a rassemblé plus de 1000 participants au cours de six sessions au pendant lesquelles les participants des gouvernements locaux et régionaux, du système des Nations Unies et des partenaires de la société civile ont partagé leurs expériences, leurs initiatives et leurs actions pour soutenir leurs communautés face à la pandémie en fournissant des services de base essentiels.
La session d’apprentissage en direct qui a eu lieu le 16 avril, organisée en collaboration avec le projet de migration de ville à ville en Méditerranée (MC2CM), a abordé la pertinence des réponses inclusives à la pandémie. Au cours de cette session, les gouvernements locaux de différentes régions du monde ont également partagé leurs aspirations pour l’avenir. Les Maires et Maires Adjoints des villes qui contribuent à changer le discours sur la migration, tels que Eric Piolle, Maire de Grenoble, Mounir Elloumi, Maire de Sfax, Mohamed Sadiki, Maire de Rabat, Souad Abderrahim, Maire de Tunis, Salvatore Martello, Maire de Lampedusa, Gissela Chalá, Maire-Adjoint de Quito, Latif Karadag, Maire-Adjoint de Gaziantep, ont été rejoints par Spyros Oikonomou, Conseil grec pour les réfugiés, et les partenaires clés de CGLU et d’ONU-Habitat en matière de migration tels que Michael Spindelegger, Directeur Général du Centre international pour le développement des politiques migratoires (ICMPD).
Maimunah Mohd Sharif, sous-secrétaire général des Nations unies et Directrice Exécutive d’ONU-Habitat, a souligné l’opportunité qu’ont les collectivités locales et régionales de changer la perception générale de la migration, en partageant des histoires sur les contributions positives des migrants et en contrant les visions préconçues. La Directrice Exécutive d’ONU-Habitat a en outre fait valoir que “les migrants doivent être inclus dans la phase de rétablissement de la pandémie, et il est vital de les inclure dans les processus de planification locale. La solidarité est nécessaire pour retrouver la prospérité“.
La Directrice Exécutive d’ONU-Habitat a rappelé aux participants que les villes sont la principale destination des migrants et doivent rester des lieux d’opportunités pour toutes les populations, soulignant encore les importantes contributions des migrants au développement économique, social et culturel des villes. Elle a souligné la nécessité de mettre fin à la ségrégation et de favoriser la cohésion sociale, de mettre un terme aux rumeurs et de contrer la xénophobie qui se répand dans le monde.
Mohamed Boudra, Maire d’Al-Hoceima et Président de CGLU, a affirmé que la pandémie que le monde connaît actuellement va changer nos perceptions et nos stratégies, en particulier en ce qui concerne la solidarité et la migration. Les maires du monde s’efforcent de s’adapter à la situation et de répondre aux besoins de leurs citoyens en cette période de crise sanitaire, a-t-il dit et a salué la prestation de services fournie par les collectivités locales et régionales et les efforts de l’ensemble de la société pour octroyer des soins à tous les citoyens.
“Demain, nous ne parlerons plus de migrants mais de citoyens des villes. Les touristes en détresse, les travailleurs migrants et les sans-papiers vivent la pandémie au sein des communautés d’accueil et sont traités de la même manière face à la pandémie”.
Michael Spindelegger, Directeur Général de l’ICMPD, a affirmé que la première priorité dans cette situation d’urgence devrait être de garantir les droits des migrants et de favoriser des sociétés inclusives en renforçant la confiance et en mettant en œuvre des réponses fondées sur des preuves. Le Directeur Général de l’ICMPD a déclaré que l’apport des villes est essentiel dans les mesures inclusives de la phase de quarantaine.
La première partie de l’expérience d’apprentissage en direct était une table ronde sur la façon dont les gouvernements locaux et régionaux répondent au besoin d’atteindre les communautés locales, indépendamment de leur statut juridique, de leurs conditions de vie ou de travail. Elle était animée par Jean Pierre Elong Mbassi, Secrétaire Général de CGLU-Afrique, qui a plaidé pour la construction de villes solidaires qui contribuent à une nouvelle perception des migrants.
Eric Piolle, Maire de Grenoble, a souligné la montée des inégalités que la crise COVID-19 pourrait entraîner si des mesures ne sont pas prises et a insisté sur les efforts de Grenoble pour améliorer l’accès aux services pour tous les citoyens en délivrant des cartes d’identité locales.
“La ville de Grenoble est une terre de refuge et de sécurité et malgré la crise, nous souhaitons apporter cette ouverture d’esprit. Grenoble est une ville ouverte avec une philosophie d’intégration qui permet aux migrants de bénéficier de la communauté locale à travers des actions de citoyenneté, l’accès à des budgets participatifs, des conseils de citoyens, le logement, les activités sportives et culturelles”.
Souad Abderrahim, Maire de Tunis, a souligné que la mise en réseau est essentielle pour guider et soutenir les villes dans leur lutte contre la pandémie et a rappelé aux participants l’importance des approches fondées sur les droits de l’homme et de la coopération en matière de gouvernance à plusieurs niveaux pour garantir que les villes répondent dûment à l’urgence avec les ressources nécessaires.
“La pandémie a touché Tunis comme la plupart des capitales du monde. Des mesures de confinement sont mises en œuvre, mais malheureusement, les groupes les plus vulnérables sont à haut risque. Nous avons mis l’accent sur les mesures sanitaires. Nous devons travailler avec le gouvernement central sur cette dimension particulièrement difficile de la pandémie”.
Salvatore Martello, Maire de Lampedusa, a appelé à transformer les perceptions générales sur la migration et à renforcer la collaboration avec la société civile. Il a déclaré qu’il est important de lutter contre les fausses rumeurs selon lesquelles les migrants apporteraient la maladie.
“Nous étions déjà en première ligne en tant que ville, avec la société civile, avant cette crise. Nous avons apporté des réponses d’urgence aux besoins les plus urgents des migrants – avant l’épidémie de COVID-19 et maintenant dans le contexte des mesures de quarantaine. Le partenariat avec la société civile est essentiel dans le cas des petites municipalités, sans installations sanitaires et isolées comme l’île de Lampedusa”.
La deuxième partie de la session a permis une discussion sur la manière dont les gouvernements locaux et régionaux soutiennent les communautés de migrants, tirent parti de leur contribution socio-économique à l’urgence et protègent les plus vulnérables. Ce segment a été animé par Lefteris Papagiannakis, ancien Maire-Adjoint d’Athènes, qui a souligné que dans de nombreux cas, le contexte actuel conduit à des restrictions de droits et que ce sont souvent les migrants qui paient le prix de récits déformés. Il a appelé à inverser ce récit, soulignant que la protection de chacun, y compris des plus vulnérables, est essentielle pour la santé de tous.
Mohamed Sadiki, Maire de Rabat, a souligné la situation souvent précaire des migrants et la manière dont Rabat s’est efforcée d’offrir un abri aux migrants sans abri. La ville s’est également efforcée de réaliser un suivi éducatif auprès des mineurs migrants.
« Nous avons essayé de recenser les migrants vivant dans la rue et de leur ouvrir les dortoirs des cités universitaires pendant cette période où l’enseignement est à l’arrêt. Nous avons connu des situations très difficiles, notamment avec les enfants vivant dans la rue, et nous essayons de maintenir un suivi éducatif au mieux de nos capacités ».
Mounir Elloumi, Maire de Sfax, a mentionné l’importance de faire face à cette crise par la solidarité et avec l’ambition de rendre les sociétés plus cohésives.
“COVID-19 nous oblige à chercher ensemble des solutions pour une véritable intégration des migrants dans nos villes et territoires. J’espère que cette pandémie sera l’occasion de changer définitivement la réalité des migrants en Tunisie”.
Gissela Chalá, Maire Adjoint de Quito, a également souligné la nécessité de développer une approche basée sur les droits pour soutenir les citoyens migrants pendant l’épidémie et au-delà. Elle a rappelé la situation particulièrement vulnérable des femmes migrantes et a déclaré que de nombreuses villes d’Amérique latine sont confrontées à la migration à l’intérieur du pays et à la situation fragile des nouveaux arrivants qui ont des emplois instables ou informels et de mauvaises conditions de logement. Elle a demandé des garanties que la situation d’urgence ne se fera pas au détriment de la démocratie et des droits de l’homme.
“Il est nécessaire de dépasser l’assistanat. L’aide aux migrants n’est pas seulement une question de solidarité, elle doit être une politique publique. L’inclusion des migrants est également essentielle pour les politiques de relance économique qui suivront après la quarantaine”.
Latif Karadag, Maire Adjoint de Gaziantep, a évoqué les défis que représente la fourniture de services adéquats aux réfugiés en pleine épidémie et a souligné que la seule façon pour une ville relativement petite de s’occuper de plus d’un demi-million de réfugiés est de pousser à l’intégration et de surmonter les barrières linguistiques et professionnelles pour y parvenir. Il a en outre mentionné qu’il est essentiel d’utiliser les talents et les compétences des réfugiés eux-mêmes. Les médecins syriens bénévoles jouent un rôle clé dans l’endiguement de la pandémie en Turquie.
Spyros Oikonomou, du Conseil Grec pour les Réfugiés, a également souligné la façon dont les communautés de réfugiés utilisaient leurs compétences collectives pour aider pendant la pandémie. Il a salué le rôle essentiel joué par les gouvernements locaux et régionaux et a appelé le groupe d’intérêt à diriger la transformation des politiques en faveur des réfugiés. Il a rappelé que l’inclusion des réfugiés et des migrants dans les mécanismes de consultation est essentielle pour faire face à la pandémie.
Mehmet Duman, Secrétaire Général de CGLU-MEWA, a fait valoir que la contribution des organisations internationales est essentielle pour soutenir les autorités locales et tirer parti de leur action au niveau mondial. Il a en outre souligné les efforts importants déployés dans les villes des régions de MEWA dans des circonstances difficiles et a indiqué le fait que dans les villes turques, le pourcentage de cas de COVID-19 parmi la communauté des migrants est comparable à celui des communautés d’accueil.
Emilia Saiz, Secrétaire Générale de CGLU, a conclu la session en déclarant que les discussions devaient avoir un impact sur la manière dont les autorités locales abordent la crise et ses conséquences. Il est essentiel, a-t-elle soutenu, de relier cet élan sur la défense des services publics à nos efforts de plaidoyer auprès des gouvernements nationaux et du système international. “Réduire l’offre de services pour surmonter la crise est la pire idée possible et affectera profondément les conditions de vie des migrants. Nous devons trouver un moyen de faire en sorte que bon nombre des mesures d’urgence prises en termes de logement d’urgence, de statut temporaire et de couverture santé soient transformées en mesures permanentes”.
“La plateforme “Villes pour la santé mondiale”, alimentée par Metropolis et ALLAS, est un élément essentiel de ce processus de discussion et d’apprentissage collectif, qui vise à terme à transformer la manière dont nous abordons les crises par le biais du service public, notamment parce que cette pandémie ne sera pas la dernière et que nous devons nous y préparer”.
Les villes ont été appelées à télécharger leurs expériences sur la plateforme www.citiesforglobalhealth.org où plus de 300 cas peuvent être trouvés.
Les exercices d’apprentissage en direct se poursuivront tout au long du mois et auront lieu les mercredis et les jeudis pendant la crise. La culture, les finances locales, le développement économique local et l’informalité feront partie des sujets abordés, alors que les villes du monde entier cherchent à surmonter les difficultés grâce à une nouvelle génération de solutions.