La gouvernance locale et régionale : clef pour garantir le droit universel à l’eau et l’accès à l’eau et à l’assainissement
23.05.2024
Le 10ème Forum mondial de l’eau, coorganisé par le Conseil mondial de l’eau et le gouvernement indonésien, s’est déroulé à Bali du 18 au 25 mai. Il s’agit du plus grand événement multipartite de ce type, réunissant un large éventail de parties prenantes, depuis les gouvernements nationaux jusqu’à la société civile, en passant par le monde universitaire et les autorités locales et régionales. L’engagement continu de CGLU dans chacune des éditions du Forum depuis 2006 souligne notre engagement inébranlable pour faire progresser la gouvernance de l’eau.
Suite à la signature d’un partenariat stratégique entre CGLU et le Conseil mondial de l’eau, CGLU s’est activement impliqué tout au long du Forum mondial de l’eau pour promouvoir le rôle des territoires dans la préservation de l’eau en tant que bien commun et service public universel. Le point culminant de notre mobilisation a eu lieu le 22 mai avec l’organisation de la Journée des gouvernements locaux et régionaux, ainsi que d’autres événements, soulignant notre engagement à amplifier les voix locales.
Journée des Gouvernements Locaux et Régionaux
Le processus politique des gouvernements locaux et régionaux au 10ème Forum mondial de l’eau a été officiellement ouvert le 22 mai à Denpasar, en Indonésie, avec une participation record de 300 délégués, dont 160 élus locaux et régionaux venus du monde entier – Asie-Pacifique, Europe, Amérique latine, Afrique et Moyen-Orient.
Conduite par le Président de CGLU et Maire de Konya, M. Uğur İbrahim Altay, et le porte-parole de CGLU sur l’eau et l’assainissement, M. André Viola, la délégation de CGLU a compris des représentants et des représentantes des Sections Régionales de CGLU, avec une mobilisation importante de l’Asie Pacifique, et des délégués des gouvernements locaux et régionaux du Japon, du Chili, des Philippines, de la Turquie, de l’Indonésie, du Portugal, de l’Equateur, du Népal, du Sénégal, du Maroc, du Cambodge, du Bangladesh, de la Chine, et de la Corée du Sud. En outre, la délégation a également inclus des représentants et représentantes de gouvernements nationaux, de plusieurs agences des Nations unies (FAO et UNCDR), d’organismes de bassin et de notre principal partenaire, le Conseil mondial de l’eau.
Le processus politique des gouvernements locaux et régionaux s’est concentré sur la protection de l’eau et les services publics universels, dans la continuité des initiatives actuellement menées par les Nations unies telles que le programme d’action des Nations unies pour l’eau, la conférence des Nations unies sur les océans, l’accélération de l’ODD 6, le processus sur l’eau de Douchanbé de la Décennie d’action, le Sommet One Water à New York, la Convention de la COP 15 des Nations unies sur la lutte contre la désertification (UNCCD) et la conférence sur les océans de la Décennie des Nations unies de Barcelone. CGLU a également soutenu l’idée d’organiser une Journée Mondiale du Lac, comme le propose la déclaration ministérielle.
Ces événements mondiaux ont souligné l’urgence de résoudre la crise de l’eau dans le contexte de l’aggravation des effets du changement climatique et visent à éclairer les stratégies du prochain Sommet des Nations unies pour l’Avenir.
Une Déclaration commune pour orienter les discussions du 10ème Forum mondial de l’eau
La journée d’ouverture du segment des Gouvernements Locaux et Régionaux du 10ème Forum mondial de l’eau a été marquée par l’adoption d’une Déclaration commune, point culminant d’une vaste consultation facilitée par le Secrétariat mondial de CGLU en collaboration avec ses sections et ses partenaires. Cette Déclaration a été approuvée par le gouvernement indonésien, le Forum mondial de l’eau et Cités et Gouvernements Locaux Unis, et a joué un rôle central dans l’orientation des discussions tout au long de la journée. Elle a facilité le dialogue politique entre les représentants des autorités locales et régionales et les autres acteurs politiques présents au Forum, en alignant l’agenda politique sur les solutions et les défis auxquels sont confrontées les autorités locales, en particulier dans le contexte des agendas mondiaux à venir tels que le Sommet One Water. Les recommandations politiques de cette Déclaration seront présentées lors de la cérémonie de clôture du Forum mondial de l’eau le 25 mai, afin d’influencer le prochain Sommet des Nations unies pour l’Avenir et de préparer le terrain pour le 11ème Forum mondial de l’eau qui se tiendra en 2027 à Riyad.
M. Uğur İbrahim Altay, maire de Konya et président de CGLU, a réaffirmé la nécessité de considérer l’eau comme un bien commun mondial et d’insister sur le fait qu’elle doit continuer à être reconnue comme un service public. Dans cette perspective, les gouvernements locaux doivent disposer de ressources et de mécanismes de mise en œuvre efficaces. Ces étapes importantes éclaireront notre stratégie pour le Sommet des Nations unies pour l’Avenir et la prochaine Conférence de l’eau des Nations unies.
M. Loïc Fauchon, président du Conseil mondial de l’eau, a souligné que l’évolution erratique du climat affecte les communautés et les autorités locales, et que nous sommes réunis pour rétablir le juste équilibre entre l’eau pour la nature et l’eau pour l’humanité : les gouvernements locaux sont des acteurs clefs pour contrôler l’utilisation de l’eau, et doivent donc disposer de moyens financiers et des capacités nécessaires. Le droit à l’eau doit être reconnu comme tel à tous les niveaux.
Mme Barbara Pompili, envoyée spéciale du Président de la République française pour le Sommet One Water et présidente de l’initiative de l’OCDE sur la gouvernance de l’eau, a souligné que la capacité est la clef pour les gouvernements locaux et régionaux, y compris les ressources humaines et financières.
Les stratégies de gouvernance et de financement : clefs de la réussite
Lors du Forum des gouvernements locaux et régionaux du 10ème Forum mondial de l’eau, les discussions ont continuellement renforcé les principaux engagements énoncés dans la Déclaration commune. Soulignant l’importance de l’eau en tant que bien commun mondial et droit humain, la Déclaration affirme une gouvernance inclusive et souligne l’’importance d’impliquer les communautés dans les processus de prise de décision. Elle plaide en faveur d’une gouvernance multi-niveaux renforcée et d’un engagement politique à tous les niveaux de gouvernement. Sur le plan financier, des mécanismes innovants sont préconisés pour mobiliser des fonds en faveur d’infrastructures d’eau inclusives, en particulier dans les communautés marginalisées et pour les jeunes. La Déclaration souligne l’urgence de mettre en place des cadres législatifs pour l’eau potable et l’assainissement, ainsi qu’une distribution équitable des ressources. Elle souligne également le rôle crucial des femmes dans la gouvernance de l’eau et la nécessité de faire entendre des voix diverses dans l’élaboration des politiques liée à l’eau.
En outre, les discussions ont souligné le rôle de l’eau dans les conflits et ont appelé à la solidarité internationale et à la responsabilité dans les questions liées à l’eau. La promotion du dialogue et de la coopération par l’intermédiaire des organismes de bassin et de la diplomatie des villes est également une priorité, tout comme les plans de gestion durable et les initiatives de protection des écosystèmes.
André Viola, porte-parole de CGLU pour l’eau et l’assainissement, a affirmé le rôle central des gouvernements locaux et régionaux en déclarant : « Nous jouons un rôle crucial dans la garantie de l’accès universel à l’eau, en tant qu’acteurs principaux au niveau local et responsables de la planification, de la mise en œuvre et de la gestion des services liés à l’eau et à l’assainissement, et nous devons être reconnus en tant que tels ».
Principales attentes et perspectives régionales en matière de gouvernance de l’eau au Forum mondial de l’eau
Parmi les temps forts de la Journée des Gouvernements Locaux et Régionaux, il était essentiel de consacrer un segment aux principales attentes des membres et sections de CGLU concernant le 10ème Forum mondial de l’eau.
Lors du Forum mondial de l’eau, CGLU a présenté les résultats des consultations régionales menées avec toutes les sections régionales de CGLU lors de la session « Retours sur les consultations régionales » organisée pendant le Forum des GLR. Ces consultations étaient basées sur une Déclaration diffusée auprès de nos membres afin d’informer les débats et la stratégie à long terme de CGLU sur les questions liées à l’eau. Soulignant la participation de CGLU au forum, la session a présenté les points de vue des principales grandes régions : l’Europe, représentée par M. André Viola, la Méditerranée, représentée par M. Oriol Illa Garcia, l’Amérique du Sud, représentée par M. Sergio Arredondo, et l’Afrique, représentée par M. Jean-Pierre Elong Mbassi, Secrétaire général de CGLU Afrique et M. Mohamed Sefiani, Maire de Chefchaouen.
Un accent particulier a été mis sur l’Asie, avec un segment modéré par la Dr. Bernadia Irawati Tjandradewi, Secrétaire général de CGLU-ASPAC, qui a inclus les interventions détaillées de sept représentants et représentantes élues. Le message clé de l’ASPAC a souligné que la sécurité de l’eau peut être atteinte en promouvant la gouvernance et la gestion transfrontalières et en liant la sécurité de l’eau aux avantages économiques, aux aménagements des moyens de subsistance et à l’intégration des documents de planification locaux dans les stratégies nationales.
Cette session a souligné l’importance de prendre en compte les spécificités régionales et les perspectives des gouvernements locaux et régionaux dans l’élaboration des politiques et des stratégies mondiales en matière d’eau.
Dialogue politique multilatéral sur l’eau
Ce dernier segment, intitulé « Dialogue politique multi-acteurs sur l’eau : Forger des solutions durables pour les agendas mondiaux”, a été organisé par CGLU pour faciliter un dialogue politique entre les représentants et représentantes des autorités locales et régionales et d’autres acteurs politiques présents au 10ème Forum mondial de l’eau. L’objectif était d’aligner l’agenda politique sur les solutions et les défis rencontrés par les autorités locales en préparation des agendas mondiaux, y compris le Sommet One Water. Animée par Mme Emilia Saiz, secrétaire générale de CGLU, la session a compté sur la participation de divers acteurs, dont des jeunes parlementaires, des représentants d’organismes de bassin, des représentants des gouvernements et des représentants parlementaires. Le dialogue a mis en évidence l’engagement de CGLU à favoriser le dialogue entre les différents acteurs pour faire progresser la gouvernance mondiale de l’eau et renforcer la dimension politique des questions liées à l’eau.
2ème Comité de pilotage du Sommet de l’eau
CGLU a participé au 2ème Comité de pilotage organisé le 21 mai pour préparer le Sommet One Water, dans le cadre du Forum mondial de l’eau. Pour CGLU, cela a marqué un temps fort de notre participation au forum. Lors de ce comité, nous avons souligné l’importance de la participation des autorités locales dans l’organisation de cet événement. Le Sommet vise à établir des engagements innovants et transformateurs avec l’ensemble des acteurs impliqués, servant de jalons vers la Conférence des Nations unies sur l’eau de 2026. Les solutions présentées seront axées sur le renforcement de la coopération transfrontalière dans le domaine de l’eau, la préservation des écosystèmes d’eau douce et de la biodiversité, la proposition de solutions techniques pour la gestion de l’eau, la réduction de l’empreinte de l’eau dans les chaînes de valeur mondiales et l’exploration des possibilités de combler le déficit de financement mondial dans le secteur de l’eau. Ces efforts visent à garantir le droit humain à l’eau et à l’assainissement tout en préservant notre environnement. Parmi les éléments clefs que nous mettrons en lumière, nous insisterons particulièrement sur l’importance de la coopération décentralisée, qui permet de répondre efficacement à ces objectifs ambitieux.
Focus sur l’Asie-Pacifique : Construire des villes intelligentes et résilientes au 10ème Forum mondial de l’eau
Lors du Forum, un événement spécial organisé par CGLU-ASPAC a eu lieu du 21 au 23 mai, se concentrant sur la construction de villes et de communautés intelligentes et résilientes et sur le rôle des décideurs politiques et des personnes responsables de l’aménagement des gouvernements locaux. Cet événement, qui s’est tenu dans les locaux du Forum, a mis l’accent sur le développement urbain intégré dans le contexte de la sécurité de l’eau, de la gestion de la réduction des risques de catastrophe, de l’assainissement durable et du financement de l’eau, ainsi que de la localisation de l’ODD 6.
Soutenu par le Centre des Nations unies pour le développement régional (UNCRD), le ministère de l’Aménagement du territoire, des Infrastructures, des Transports et du Tourisme (MLIT) et le gouvernement japonais, cet événement est le résultat d’une série d’ateliers de renforcement des capacités sur les villes intelligentes visant à aider les pays en développement d’Asie et du Pacifique.
Avec plus de 50 participants et participantes, dont des gouverneurs, des maires, des décideurs politiques, des personnes responsables de l’aménagement et des fonctionnaires des gouvernements locaux et régionaux de toute l’Asie et du Pacifique, l’atelier international sur les villes intelligentes et résilientes avait pour principal objectif de fournir une assistance technique et un soutien aux décideurs politiques urbains, aux responsables de l’aménagement et aux fonctionnaires municipaux. L’accent a été mis en particulier sur les pays en développement, y compris les pays les moins avancés (PMA), les pays enclavés et les petits États insulaires en développement (PEID), afin de renforcer leur capacité à mieux répondre à l’ODD 11 (Rendre les villes et les établissements humains inclusifs, sûrs, résilients et durables) grâce à des solutions et des mesures de villes intelligentes. L’atelier a mis l’accent sur la présentation de pratiques exemplaires et d’études de cas, notamment en ce qui concerne la mise en œuvre de technologies et de solutions de gestion intelligente de l’eau et de réduction des risques de catastrophe.